Les mots écrits, qui du dedans s’écrivent et qu’aussitôt je dois poser sur le
papier. Les mots n’attendent pas, ils s’allument les uns aux autres par sens
sonorité et sororité sang. Ils accourent tout seuls, ils naissent bousculés,
génération vitesse, et mis sur le papier, ils s’harmonisent assonancés comme un
essaim d’abeilles, trouvant spontanément leur voisin de cellule, ma main
photocopie le puzzle de ma tête.
L’idée n’est pas idée, elle est inscrite dans, elle surgit au passage du mot,
en méthode anarchique, du mot entendu, prononcé ou seulement vécu. Les mots se
vivent en sens, en sang et retiennent longtemps leur flot révoltateur.
Est-ce pour dire en corps ce qui brise le cœur ? le désespoir se joue sans
solfège sur des instruments libres. Tous les manques écrits chantent au lieu
d’agir.
Empêchement d’agir. Barrage. L’eau retenue longtemps déborde, crée des courants
sauvages, le mal devient utile, les usines hydro-néologiques alimentent la
machine à respirer, la mienne. Car créer pour certains, c’est tangible et
facile, pour moi c’est me créer, c’est renaître et devenir enfin celle que je
me suis toujours senti être. Les jeux de mots apparents ne cachent pas la
vérité, ils sont de chair et d’os et de souffrance pure.
J’aime les mots, je les adore, sans les dire, ils me sont nécessaires car je ne
parle qu’au papier.
Les cris et la couleur tripaillent allègrement dans les livres de femmes qui
parlent sensations, odeurs, touchers, douceurs.
J’aime aussi livres d’hommes mais taillés à la hachure près, pleins de finesse
dans leur crudité.
Les poèmes masclés sont des épopées rouges, les poèmes femelles des histoires
d’amour.
Un poème n’est pas fait de mots qui riment platement comme rime théière
avecques cafetière. C’est l’utilisation impromptue du mot, la pensée qui est
magique, la façon de ne pas percevoir le monde.
Les feuilles d’automne sont rouges, mais que vous fait à vous la feuille rouge
sans le silence de l’oiseau ?
D’abord l’odeur du mot, une odeur de café qu’on voit sur un écran avec
l’irrépressible envie d’en boire, la soif parfum du mot.
La poésie se démarque de tous les dictionnaires, elle est pouvoir intime.
Ma poésie est motionnaire, émotionnaire, virevoltante, engoulevante,
carapaceuse, araignère, pregnante, enceinte, tordue et chiffonnée, intestine et
saignante, fine douce et méchante, tortionnaire.
Marine 1992
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